Privés de marché asiatique et handicapés par le calendrier, les derniers professionnels du littoral de la région n’arrivent plus à vivre de leur activité.
Bernard Pérez, président du comité régional des pêches et élevages marins ne mâche pas ses mots : "Il faut trouver des moyens et solutions, ou les pêcheurs crèveront." Ces pêcheurs menacés d’extinction, ce sont les 167 titulaires d’une licence de pêche de l’anguille en Occitanie.
Les professionnels de cette pêche ancestrale sont financièrement à l’agonie, d’autant plus que l’immense majorité d’entre eux ne pratique que celle-ci.
Les difficultés ne datent pas d’hier, mais la crise sanitaire actuelle les a encore amplifiées et l’activité est quasi nulle désormais. Les cours sont au plus bas et le marché est saturé. Une réunion de crise, réunissant pêcheurs et mareyeurs s’est tenue voici quelques jours. Elle a accouché d’un courrier, adressé au Cépralmar et à la Région pour appeler à l’aide. "La Région Occitanie a soutenu et aidé les pêcheurs pour affronter la crise. Toutefois, pour les pêcheurs d’anguille, les difficultés vont inévitablement durer".
"Aucun professionnel ne peut gagner sa vie à ce prix"
Ce que préconise Bernard Pérez c’est qu’une étude soit menée "portant sur les prélèvements, l’économie, les marchés et les perspectives". "Il faut inventer des outils de valorisation du produit à l’échelle du territoire", ajoute-t-il.
Plusieurs facteurs ont contribué à mettre en péril l’activité de pêche de l’anguille. En premier lieu, la protection de l’espèce par la Cites qui empêche toute exportation hors de l’Union européenne et prive les pêcheurs et intermédiaires du marché asiatique, gros consommateur d’anguilles.
Autre facteur : le développement de l’élevage dans les pays nordiques qui a pour effet d’avoir fait chuter les cours en saturant le marché européen. Le kilo d’anguille se vend autour de 4 € actuellement. "Aucun professionnel ne peut gagner sa vie à ce prix", souligne Bernard Pérez. Et si l’élevage s’est si vite développé, c’est en raison du fait que les civelles (juvéniles) sont vendues à vil prix.
Enfin, la réduction drastique des périodes de pêche a un impact sur la régularité des revenus. Sur la limitation de pêche et l’autorisation d’exporter, aucun espoir de machine arrière n’est permis, même si les professionnels affirment que la ressource est importante. "Là, il faut gérer l’urgence et éviter les drames humains", insiste le président du CRPEM. Parmi les pistes évoquées pour générer des revenus rapidement : demander des autorisations de "relâcher" au ministère de la Mer. Pour ce type d’opération, le kilo de poissons est payé environ 8 €.
Le monde de la marée est condamné. Comment voulez-vous fonctionner avec sept mois de pêche par an ?
Jérôme Micheau est producteur distributeur d’anguilles sauvages. Sa société implantée à Port-la-Nouvelle a longtemps été l’une des leaders du marché français, et florissante. Elle a compté jusqu’à 80 employés. Il n’en reste plus qu’un seul désormais. Les deux fils du patron se sont lancés dans la pêche classique pour subvenir à leurs besoins. Et Jérôme Micheau attend septembre pour décider s’il met ou non la clef sous la porte.
"Le monde de la marée est condamné", affirme-t-il. "Rien n’est fait pour le sauver. Comment voulez-vous fonctionner avec sept mois de pêche par an ? Et quand on l’interdit en juillet et août, privant les pêcheurs de la clientèle touristique !", s’insurge Jérôme Micheau ; "Pour sauver la filière, il faudrait porter le prix de la civelle à 600 € au lieu de 150 aujourd’hui. Mais cela ne se produira jamais, il y a trop de business", dit-il.
July 25, 2020 at 09:16PM
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Méditerranée : les pêcheurs d'anguilles ne veulent pas disparaître - Midi Libre
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